Questionner la mort pour mieux apprécier la vie

19.02.2024

Ils ont entre 12 et 92 ans. L’un est mort dans un accident de la route, un autre se prépare à mourir des suites d’une longue maladie, un autre encore ne supporte plus cette vie et se suicide. Ils sont six. Chacun à leur tour, ils racontent leur vie et leur mort, léguant ainsi à ceux qui restent, l’héritage de leur expérience.

Rachel Monnat durant sa performance lors de la conférence sur son dernier livre Je suis mort

Le 8 février dernier, le Service du cheminement de la Foi (SCF) a donné la parole à l’écrivaine et artiste jurassienne Rachel Monnat pour évoquer son dernier livre au titre évocateur qui traite d’un sujet encore tabou. Dans son ouvrage d’autofiction intitulé Je suis mort, l’autrice parle librement et en toute franchise de la mort. Au travers de cette conférence qui s’est tenue au Centre Saint-François à Delémont, Rachel Monnat nous a invités à nous questionner sur notre rapport à la mort mais également notre rapport à notre corps.

Une touche-à-tout

Née en 1979 dans le canton du Jura, Rachel Monnat a passé une enfance baignée dans la religion. Après avoir travaillé six ans comme infirmière, la jurassienne ne trouve plus sa place dans son métier. Elle décide donc de tout quitter et de sortir des sentiers battus pour devenir modèle pour les peintres, les dessinateurs et les sculpteurs. Portée par un besoin de s’exprimer artistiquement, elle crée et joue deux Seuls sur scène en tant qu’autrice, comédienne, chanteuse, danseuse et productrice. En 2021, elle crée sa maison d’édition Accrosens Éditions et sort consécutivement L’intouchable nudité et Un jour, j’ai jailli. Essayant de comprendre des thèmes qui nous touchent tous.tes mais qui semblent être encore tabous, Rachel se laisse porter par des questions de sexualité, de nudité et de mort qu’elle met en scène dans ses livres ou sur scène. Initialement prévu en spectacle, elle a finalement décidé de faire paraître Je suis mort sous forme de nouvelles fin 2023.

Si on accepte la mort, on accepte la vie

Partir de celui qui est mort pour le laisser nous raconter son histoire. Voilà le défis que s’est lancé Rachel Monnat en se mettant dans la peau de personnages décédés. Pour beaucoup, la perspective de s’en aller semble angoissante. Qu’est-ce qu’il y a après ? Au travers de son livre, l’autrice nous invite à nous recentrer sur notre corps pour apprécier la vie. Elle tend à nous rappeler que la mort est là et que la refuser c’est s’empêcher de vivre pour ne pas mourir. Être en paix avec cette dernière permet de prendre conscience qu’elle ne gomme pas tout. En effet, les personnes décédées restent présentes dans l’amour que leur portent les vivants. Selon Rachel Monnat, la vie n’est jamais aussi intense que lorsqu’on est proche de la fin.

Osez la liberté d’être

D’après Rachel Monnat, ce que nous amenons dans la mort, ce ne sont pas les biens matériels mais ce que nous sommes, l’amour que nous avons partagé sur terre. Dans une société qui semble plutôt axée sur le Faire, revenir aux bases pour aller à l’essentiel semble nécessaire. Ralentir. Oser juste Être. Apprendre à apprivoiser son corps en faisant les choses en conscience. Voilà ce que Rachel Monnat souhaite transmettre au travers de ces différents ouvrages et performances.

Lors de cette soirée, la comédienne jurassienne nous a transportés dans une sorte de quête identitaire du corps : au début, ce dernier est dans le mouvement, il s’agite pour découvrir ce qu’il doit faire pour être. Ensuite, il s’arrête, fait une pause. Ce corps ne fait rien, mais est contemplé par les autres : Il est. Et finalement, avec la mort, cette enveloppe charnelle s’en va. Le corps n’est plus mais l’amour reste. Tout s’ouvre, il n’y a plus de limite. Au travers de sa performance, Rachel Monnat nous invite à oser être sans tabous. Elle nous propose de faire cohabiter le corps et l’esprit pour prendre conscience de notre liberté d’Être.