L’histoire monastique de la région jurassienne au Haut Moyen Âge est d’une richesse exceptionnelle pour la Suisse — et Saint-Ursanne y occupe une place de choix. Selon la tradition, Ursanne aurait été un compagnon du grand saint irlandais Colomban, qu’il aurait quitté pour vivre en ermite au bord du Doubs, où il serait mort en 620. Le couvent érigé vers sa tombe est à l’origine de la localité actuelle de Saint-Ursanne. Le colloque posera le contexte historique dans lequel s’inscrit l’ermite du Clos du Doubs, et il fera la synthèse de nos connaissances actuelles. Sur la base des découvertes archéologiques, des vestiges matériels et des sources écrites (à commencer par la Vie d’Ursanne), historiens et archéologues feront le point sur l’histoire du saint, de son culte et de la bourgade ursinienne.
Programme de cette journée "historique"
Samedi 3 octobre 2020
MATIN
CENTRE VISITEURS DU PROJET MONT-TERRI (à côté de la gare de Saint-Ursanne)
- 09h30–10h00 Accueil, café
- 10h10–10h15 Introduction
- 10h15–10h45 Le contexte mérovingien : pouvoirs politiques et religieuxJean-Claude Rebetez, conservateur des Archives de l’ancien Évêché de Bâle
- 10h45–11h15 Le Jura au Haut Moyen Âge — les données archéologiquesRobert Fellner, archéologue cantonal jurassien
- 11h15–11h45 L’ours : du paganisme eurasiatique à l’hagiographie médiévalePhilippe Walter, professeur émérite de l’Université de Grenoble-Alpes
- 11h45–12h00 Questions
- 12h00–13h30 Pause
APRES-MIDI
COLLÉGIALE DE SAINT-URSANNE
- 13h30–14h00 Colomban et Ursanne : légendes et réalités historiquesAnne Wagner, maître de conférences à l’Université de Franche-Comté
- 14h00–14h30 Saint Wandrille à Saint-Ursanne : histoire d’une non-histoirePascal Pradié OSB, membre attaché du CNRS
- 14h30–15h00 Les sarcophages du Musée lapidaire : typologie et provenance d’une importante collection mérovingienne Fabrice Henrion, archéologue médiéviste au Centre d’études médiévales d’Auxerre
- 15h00–15h15 Pause
- 15h15–15h45 620–2020 : 14 siècles de constructions autour d’un tombeau Antoine Gauthiez, archéologue et architecte, Office du patrimoine et de l’archéologie du Canton de Neuchâtel
- 15h45–16h15 Saint-Ursanne : un développement urbain organiqueUrsule Babey, archéologue à la Section d’archéologie et paléontologie de l’Office de la culture du Canton du Jura
- 16h15–16h30 Questions
ORGANISATION ET RENSEIGNEMENTS
- Colloque d’histoire et d’archéologie organisé dans le cadre du 1400e anniversaire de la mort de saint Ursanne
- Organisation scientifique : Archives de l’ancien Évêché de Bâle
- Avec le soutien de : République et Canton du Jura
- Section de Porrentruy de la Société jurassienne d’émulation
L’inscription au colloque est gratuite, mais obligatoire en raison de la situation sanitaire (délai d’inscription au 26 septembre).
En cas de limitation drastique du nombre d’auditeurs et d’auditrices imposée par les Autorités, une diffusion des conférences sur les réseaux sociaux sera proposée (informations sur le site web www.aaeb.ch).
Ursanne: un saint mérovingien et sa postérité
Résumés des conférences
Le contexte mérovingien: pouvoirs politiques et religieux,Jean-Claude Rebetez,conservateur des Archives de l’ancien Évêché de Bâle
L’exposé visera à resituer la région dans le cadre des rapports de pouvoirs entre les royaumes francs (de l’expulsion de Colomban par Brunehaut au meurtre de s. Germain de Moutier-Grandval) et il esquissera un tableau du contexte religieux, tant sur le plan des structures diocésaines quemonastiques–en abordant naturellementla problématique des «saints régionaux»: Imier, Ursanne et Germain.
Le Jura au Haut Moyen Âge –les données archéologiques, Robert Fellner, archéologue cantonal jurassien
Que sait-on du peuplement du Jura au temps d’Ursanne? Comment les habitants organisaient-ils leurs existences au tournant du VIIesiècle? Les sources historiques étant rarissimes, ce n’est que l’archéologie qui peut y donner des réponses. Les fouilles réalisées ces dernières décennies ont livré de nombreuses découvertes qui permettent d’esquisser une image plausible de la vie régionale durant le Haut Moyen Âge.
L’ours: du paganisme eurasiatique à l’hagiographie médiévale, Philippe Walter, professeur émérite de l’Université de Grenoble-Alpes
Premier dieu connu du paléolithique, héros mythique de grandes épopées comme guerrier-fauve (Beowulf, Arthur), roi des animaux (avant le lion), l’ours a longtemps dominé l’imaginaire humain. Dans la perspective de la longue durée, son entrée dans l’hagiographie chrétienne médiévale achève de le soumettre à une conception eschatologique du temps et l’arrache au vieux rythmecyclique de l’éternel retour.
Ursanne:légendes et réalité historique, Anne Wagner, maître de conférences à l’Université de Franche-Comté
Le succès du modèle colombanien vient très probablement des qualités littéraires de la Vie de Colombanpar Jonas. La «mode colombanienne» ne fait que s’amplifier avec le temps et le XIesiècle est une période de grand développement de l’imaginaire du monachisme colombanien (comme par exemple à Cluny): c’est dans ce contexte que s’inscrivent Desles de Lure et Ursanne, d’après sa Vita commandée au XIesiècle par l’archevêque Hugues de Besançon(mais quel Hugues? Trois archevêques portent ce nomau XIesiècle...)
Saint Wandrille à St-Ursanne: histoire d’une non histoire, Pascal PradiéOSB,membre attaché du CNRS
Selon la seconde Viede Wandrille, rédigée dans l’abbaye normande de Fontenelle à l’époque carolingienne (dans la première moitié du IXesiècle), Wandrille aurait vécu quelques temps auprès du tombeau d’Ursanne et y aurait fondé la communauté monastique. Cet épisode peut-être fictif n’a pas laissé d’autres traces historiographiques et n’est pas mentionné dans la Vied’Ursanne. L’exposé visera à faire le point sur cette question difficile.
Les sarcophages du musée lapidaire de Saint-Ursanne: typologie et provenance d’une importante collection mérovingienne, Fabrice Henrion, archéologue médiéviste au Centre d’études médiévales d’Auxerre
Les sarcophages conservés à Saint-Ursanne constituent une collection du plus grand intérêt,tant il est rare de disposer de plusieurs dizaines d’exemplaires issus potentiellement d’un même site. L’étude que nous devons mener au cours de l’été 2020 permettra de les classer dans une typologie (établie à partir de critères techniques et morphologiques) et dans une chronologie. Par ailleurs, une analyse pétrographique de chaque exemplaire permettra d’envisager les sites de production et d’ouvrir alors la réflexion à des problématiques économiques et sociales.
620-2020 : quatorze siècles de construction autour d'un tombeau, Antoine Gauthiez, archéologue et architecte, Office du patrimoine et de l’archéologie du Canton de Neuchâtel
S’appuyant sur un relevé complet en photogrammétrie des constructions religieuses de St-Ursanne, ce travail réévalue les connaissances historiques et architecturales des lieux à la lumière des méthodes de l’archéologie du bâti. L’exposé présentera également les restitutions des différents bâtiments au fil des siècles,de l’ermitage à la collégiale.
Saint-Ursanne: un développement urbain organique, Ursule Babey, archéologue à la Section d’archéologie et paléontologie de l’Office de la culture du Canton du Jura
Depuis l’été 2016, les fouilles archéologiques associées aux travaux de génie civil en vieille ville de Saint-Ursanne renouvellent les connaissances sur la cité. Explorées une à une, les rues révèlent la densité, la variété et la bonne conservation des vestiges, notamment organiques, qui apportent un nouvel éclairage sur le développement de la ville,dont l’histoire semble commencer avant l’arrivée d’Ursanne, plusieurs traces de l’époque romaine ayant été mises au jour.