L’abbé Christian Schaller sera officiellement installé à Tavannes le 26 novembre, lors d’une messe à l'Eglise Christ-Roi, où il est curé depuis le 1er octobre.
Qui êtes-vous ?
Originaire de Rebeuvelier, je suis né et ai grandi à Tavannes où mes parents tenait l’hôtel-restaurant des Deux Clefs. J’ai quitté ce village il y a 45 ans, mais je me sens d’ici. Avant d’être ordonné prêtre j’ai bourlingué à Londres, puis en Espagne et j’ai débuté mon ministère à Courgenay-Cornol, avant de passer par Bottmingen-Binningen près de Bâle; je quitte à présent la paroisse française de Berne après une dizaine d’années.
Comment envisagez-vous le retour dans votre village natal ?
Il y a surtout beaucoup de curiosité. Bien sûr un regard attiré par le rétroviseur pour se remémorer les années passées et en même temps l’envie de regarder vers l’avant. Il y a beaucoup de choses que je ne connais plus ou pas. Il faudra relever le défi car tout ne sera pas comme il y a 50 ans et les choses vont encore changer. Je suis le dernier prêtre à être né et avoir grandi dans le canton de Berne, ça pose questions… Il faut préparer une communauté d’avenir dans l’espérance : on n’est pas là pour fermer une boutique, on est là pour donner vie et envie.
La réalité pastorale sera sans doute bien différente dans la Tramata.
Le paradigme va changer, je passe du centre à la périphérie. À Berne, il y a énormément de célébrations ; on donne par exemple 1200 confessions par an. Mais je ne viens pas ici la tête baissée. Je ne suis pas seul, il y a une communauté et les premières communautés n’ont débuté qu’avec quelques disciples. On est là pour veiller sur le feu, pas pour conserver des cendres. Du reste cette terre n’est pas asséchée, il y a eu de grands personnages dans cette région : Germain et Randoald, les moines de Bellelay et puis il y a toutes ces communautés chrétiennes. Il faut essayer d’amener les gens à revenir à la source. Aider ceux qui sont épuisés à retrouver le puits.
Après 30 ans de sacerdoce, quelle évolution voyez-vous ?
À l’époque il y avait une religiosité populaire, je pense par exemple aux célébrations de la Fête-Dieu en Ajoie, alors qu’aujourd’hui on est dans quelque chose de plus intimiste. Mais l’essentiel est de pouvoir se relier à la communauté afin de pouvoir grandir ensemble. Il faut aider l’individuel à grandir en communauté.
Comment être en communauté aujourd’hui ?
On vit certes dans un monde de consommation où la solitude est une des grandes souffrances qui ne peut être comblée par le virtuel. La relation est aussi faite grâce à la religion qui nous relie à l’autre. Si on ne soigne pas ses liens, on se déshumanise. Je crois beaucoup au rassemblement autour de la table, là où l’on peut avoir un sentiment d’appartenance et être pris en considération. Aussi longtemps que l’Église sera capable de nourrir les gens au sens propre comme au sens figuré, elle existera. Une famille qui ne trouve plus le temps de se rassembler est une famille en danger. Dans un monastère, la table se trouve au réfectoire, littéralement l’endroit où l’on se refait.
Cuisiner est donc une de vos passions…
C’est avant tout une nécessité : le besoin d’être au service, ce côté maternel de veiller à ce que chacun ait sa part, sa place et sa reconnaissance. Prêcher c’est facile, mais il faut aussi se confronter à la réalité et mettre la main à la pâte. Et c’est beaucoup plus efficace d’aller vers un conseiller fédéral en lui disant « Regardez, la personne qui vous sert est un sans-papier » que de lui faire un sermon. Mais j’avoue tout de même un côté épicurien : il faut célébrer la vie, aimer ce qui est beau, bon et bien. Et c’est vrai que si je retrouve un peu de temps libre, je me remettrai à la peinture.
Nous souhaitons à l’Abbé Schaller une cordiale bienvenue et beaucoup de bonheur à vivre et à partager !
Propos recueillis par Jean-Louis Crétin et Thierry Chételat