Texte de Didier Berret
« Que nous veux-tu…? » ou plus littéralement « Quoi entre nous et toi, Jésus de Nazareth ? A qui donc appartient cette voix singulière qui parle en «nous»? A l’homme ou à l’esprit impur ? Comme si l’un et l’autre agglutinés ne formaient plus qu’un, tout en n’étant personne.
Voilà bien le tragique de cet homme, dépossédé de lui-même, habité par une voix qui s’exprime en son nom, sort de sa bouche et pourtant n’est pas la sienne. Etrange parole qui sait si bien: «tu es le Saint de Dieu» et qui comprend si mal: « tu es venu pour nous perdre .»
L’homme à l’esprit impur n’erre pas dans les taudis, il pratique à la synagogue comme il faut, le jour du sabbat. Il connaît ses prières, mais la pluie de la Parole n’entre pas dans ce cœur obstrué par les ronces. Un perroquet dirait le pape François. Une parole hostile vocifère en lui, à moitié juste, complètement fausse, comme toutes ces sentences à l’emporte-pièce qui détruisent, dénaturent, confisquent jusqu’à la pensée de Dieu. «Tu es venu pour nous perdre» est l’antonyme parfait du prénom de Jésus «celui qui vient pour nous sauver.»
«Etrange parole qui sait si bien: ‘tu es le Saint de Dieu’ et qui comprend si mal: ‘tu es venu pour nous perdre.’»
Voilà donc l’impur qui pervertit les mots, leur donne un sens à rebrousse-poil, interdit la pensée ou l’impose, ce qui revient au même. L’esprit impur n’a pas de nom. Il braille en «nous», crie plus fort que les autres, s’installe en eux, les manipule, leur dit quoi dire ou parle pour eux. Une même langue, des mêmes mots, lobotomisation, Babel! Malheur au prophète qui parle au nom des autres, prévenait déjà Moïse!