Le vendredi 10 février, les agents pastoraux du Jura pastoral se sont retrouvés au Centre paroissial l’Avenir à Delémont pour une session de formation sur la Pastorale des Funérailles. Cette formation a été animée par Alain Viret, théologien et formateur au CCRFE.
Intimité et nouveaux rites
Dans sa présentation, Alain Viret a rappelé qu’une privatisation des rites funéraires est de plus en plus fréquente. De nombreuses familles ont continuellement recours à des funérailles célébrées dans l’intimité. Cette situation ne favorise pas la dimension communautaire.
Le dispersion des cendres dans la nature, en montagne ou dans les lacs, est une pratique de plus en plus courue. Cette forme de spiritualité panthéiste est grandement influencée par la sensibilité écologique d’aujourd’hui. D’autres rites sont proposés en lien avec les nouvelles technologies, notamment sur des sites internets, véritables vitrines numériques de mémentos de défunts. Certains laïcs proposent de plus en plus des animations de funérailles sans être reliés à des institutions religieuses.
Les principaux défis du deuil
L’un des principaux défis est de rejoindre les gens dans leur cheminement spirituel, ne passant plus forcément par les voies traditionnelles d’appartenances ecclésiales. Cela va nécessiter beaucoup d’écoute et de doigté, un peu comme le Christ qui chemine avec ses disciples sur le chemin d’Emmaüs. Ce temps de partage, de questionnement et d’écoute, peut apporter des réponses à une situation de détresse causée par la perte d’un être cher.
Un autre défi sera de trouver un langage adapté et compréhensible. De nouveaux choix de textes peuvent être mis à disposition. Toutefois, il faudra mieux mettre en valeur les symboles utilisés dans nos liturgies des funérailles pour les rendre plus compréhensibles. L’enjeu sera aussi de bien faire prendre conscience que la mort n’est pas un point final, le terme de notre existence terrestre. La mort est aussi une question de vie qui traverse notre condition biologique par une série de deuils successifs : de la naissance à la petite enfance, de l’enfance « adulte » à l’adolescence, etc.
Les symboles dans le rituel des funérailles
Les symboles forts de la liturgie chrétienne sont ceux du baptême. On rejoint ici la signification profonde du baptême qui est de faire mourir en nous l’homme ancien pour le faire renaître à l’homme nouveau en Christ. C’est être plongé dans la mort pour renaître à la Vie. C’est un engendrement, une nouvelle naissance. Les grands symboles que l’on utilise lors des funérailles sont parlants pour les personnes en situation de deuil : la lumière, l’eau, la Parole lue, la croix et bien sûr l’eucharistie, quand on peut la vivre.
Par conséquent, il y a là, toute une richesse des symboles qui sont universels. La lumière par exemple parle à beaucoup de monde. L’enjeu sera donc de mettre ces symboles en valeur et de les soigner. Il faudra encourager les gens à participer à une démarche gestuelle. Le rituel offre déjà des possibilités mais l’agent pastoral devra être plus imaginatif en associant de manière plus appropriée les personnes au langage symbolique.
Une session de formation en trois temps
Cette session de formation a été construite autour de trois grands axes. Le premier consiste à observer le contexte sociétal dans lequel nous sommes. C’est-à-dire de prendre conscience des mutations entourant l’approche de la mort et de ses nouvelles ritualités.
Le deuxième temps concernait un domaine plus pastoral où l’on a cherché à voir comment cette pastorale des funérailles évolue dans le temps d’aujourd’hui. Une liturgie centrée sur le mystère de Pâques en révélant une approche synodale qui met en commun la diversité des ministères et des compétences offertes au monde de ce temps. L’enjeu sera donc de mieux accompagner les hommes et les femmes d’aujourd’hui dans leurs situations de détresse liées à l’expérience de la mort.
Le troisième temps porte sur le rituel des funérailles tel que l’a voulu la réforme liturgique, de bien saisir l’importance des grands moments proposés en liturgie des funérailles. « J’ai pris l’Evangile d’Emmaüs comme fil rouge parce que l’on retrouve là, l’importance du cheminement avec celle de la relecture de récits de vie qui ouvrent à l’intelligence des écritures. Il est important de poser un signe, un geste qui soit parlant », explique Alain Viret.
Les derniers adieux
C’est le moment où l’on va se séparer du défunt. Cette démarche ouvre une nouvelle page tournée vers l’avenir. Pour reprendre une expression donnée dans la prière matinale, texte de la résurrection de Lazare, « Le délié laisse le mort avec les morts, de façon à ce que les vivants puissent continuer à vivre un autre type de relation et de communion avec lui ».
Paradoxalement, la mort est une question de vie, parce qu’il n’y a pas de vie sans mort. Quand on observe toute l’évolution du vivant, on passe d’un état à un autre. Déjà le petit enfant doit mourir à sa vie utérine pour renaître au grand jour. Aussi, l’enfant doit mourir à sa vie d’enfance pour entrer dans sa vie d’adulte. Ces passages sont souvent des moments de crises, mais au sens positif. Ce sont des moments de croissance et des moments d’ouverture.
Les enjeux face à l’avenir
Il est certain que l’Eglise possède un riche patrimoine, une riche tradition qui est celle de cet accompagnement des mourants. Elle annonce une espérance qui rappelle que la mort n’est pas un drame absolu. C’est un passage vers une vie nouvelle. C’est un lieu et un moment de vérité, un temps d’anamnèse de tout ce qui a fait notre histoire de vie. On peut discerner les traces de Dieu, les signes d’un Dieu vivant dans le parcours de notre existence. La société actuelle est confrontée à une accélération du temps qui peut parfois nous faire oublier les grandes questions liées au sens que l’on donne aux événements tragiques que nous traversons.
La question de l’enjeu anthropologique face à l’homme de demain : rappeler que notre condition humaine ne peut se réduire à la finitude de notre vie biologique, ni à la notion de culpabilité que nous ressentons. Chacune et chacun est créé à l’image de Dieu. Dieu nous accueille alors avec bienveillance et tendresse. Ce message d’Espérance doit rester au cœur de l’annonce chrétienne dans un monde un peu trop désespéré.
Arnaud Juillard