Anne-Marie Kaufmann, curé de Berne, est l'une des dix femmes prêtres de Suisse | © Pierre Pistoletti
13.06.2019 par Pierre Pistoletti
En Suisse, une petite dizaine de femmes exercent un ministère sacerdotal au sein de l’Eglise catholique-chrétienne, l’une des trois Eglises officiellement reconnues. Rencontre avec l’une d’entre elles, Anne-Marie Kaufmann, en marge de la grève des femmes.
“Je n’aime pas trop m’exprimer en public. Sauf dans une église”, glisse Anne-Marie Kaufmann en traversant la nef de l’église Saint-Pierre-et-Paul de Berne. Prêtre depuis bientôt 15 ans, elle a suivi une voix discrète et tenace qui l’enjoignait à prendre sa place derrière l’autel. “Tout ne s’est pas fait en un jour”, explique-t-elle avec une pointe d’accent suisse-allemand à peine perceptible.
Curé, de père en fille
Chez elle, la foi est une affaire de famille. “Mon père était curé. Nous avons grandi dans une cure”. Pour autant, le choix du sacerdoce est venu sur le tard. “Une fois ma maturité en poche, j’ai quitté Zurich pour une formation d’agricultrice dans la campagne chaux-de-fonnière”. Elle y rencontre son mari. Ensemble, ils parcourent le monde avant de revenir en terres neuchâteloises pour reprendre une ferme. Entre les vaches laitières et les champs de légumes, trois enfants verront le jour. A l’intérieur du couple, l’égalité se vit sereinement. “Mon mari s’occupait des enfants et moi de la ferme, à tour de rôle”.
La vie s’écoule ainsi jusqu’à ce qu’une crise l’amène à entreprendre des études de théologie. Nous sommes en 1995, Anne-Marie Kaufmann se retrouve sur les bancs de la Faculté de théologie catholique-chrétienne de Berne. Le couple s’adapte. “Nous avons dû lâcher les vaches laitières et demander un peu d’aide pour le ménage”.
De la ferme à l’autel, le saut n’est pas si grand: le travail de la terre prédispose à celui de l’esprit. D’ailleurs le Nouveau Testament est truffé de semeurs, de bergers, de champs et de moissons. Alors qu’Anne-Marie Kaufmann parfait ses connaissances de grec et d’hébreu, son Eglise est sur le point de faire aboutir une réflexion de plus de 30 ans en vue d’accepter l’ordination des femmes.