La tourmente dans laquelle l’Eglise catholique est prise actuellement donne une portée et une actualité saisissantes à l’évangile de ce dimanche. Jésus enseignait la foule et voilà que des scribes et des Pharisiens lui amènent une femme prise en flagrant délit d’adultère.
Les scribes et les Pharisiens ne sont pas des prêtres, ils exercent néanmoins un magistère intellectuel au cœur du peuple. Ce sont des théologiens, très au courant de ce que demande la Loi: pour un pareil cas, c’est la lapidation, “pour ces femmes-là“ précisent-ils, avec tout le mépris des gens d’en haut pour ceux d’en bas, des “purs“ pour les pécheurs, ou plutôt pour les pécheresses…
Le piège est tendu pour Jésus: ou bien il acquiesce à la condamnation et c’en est fini de sa miséricorde qui attire les pécheurs, ou bien il gracie et il est en contradiction avec la Loi. Système binaire redoutable et simpliste.
Premier étonnement: depuis quand l’adultère est-il une affaire de femme seule? Où donc est passé le partenaire de la pécheresse, mystérieusement disparu du champ de vision? Deuxième étonnement: ce sont des hommes, spécialistes de la Loi, qui brandissent la lapidation face à cette femme épouvantée, qui n’a aucune chance de s’en sortir. En un mot, la femme serait du côté du péché et les hommes du côté de la morale et du droit…?
Mais voilà que ces mêmes Docteurs sont interpellés par Jésus: “celui d’entre vous qui est sans péché, qu’il soit le premier à lui jeter une pierre“. Frappés comme par un missile, ils quittent la scène, les plus vieux en premier. C’est ce qui s’appelle en bon français: “faire la vérité“!
“En s’abaissant, Jésus évite d’abaisser la femme en présence des scribes érigés en juges.“
L’attitude de Jésus donne à penser. Lui, le Saint, aurait pu s’indigner, en appeler au droit de Dieu et fustiger le péché. Mais voilà qu’il s’abaisse et écrit sur le sol. Des exégètes ont cherché à savoir ce que Jésus avait écrit… alors qu’on n’en sait rien. L’important, ce ne sont pas ces quelques lettres écrites sur la terre mais l’attitude du Sauveur.
En s’abaissant, il évite d’abaisser la femme en présence des scribes érigés en juges. En s’abaissant par pudeur, il redonne un peu de dignité à cette femme, certes pécheresse mais aussi blessée et humiliée. Il attend de pouvoir entrer dans une relation vraie avec elle, seul à seul. Le péché même grave n’efface en personne la trace du Créateur et encore moins l’appel à être aimé et sauvé.
Une fois les accusateurs écartés, Jésus peut se redresser et regarder cette femme en vérité et avec tendresse. Elle n’est plus un cas dont on parle, mais une personne à qui il parle: “Je ne te condamne pas, va et désormais ne pèche plus“
Jean-Michel Poffet | Vendredi 5 avril 2019
Jn 8, 1-11
En ce temps-là,
Jésus s’en alla au mont des Oliviers.
Dès l’aurore, il retourna au Temple.
Comme tout le peuple venait à lui,
il s’assit et se mit à enseigner.
Les scribes et les pharisiens lui amènent une femme
qu’on avait surprise en situation d’adultère.
Ils la mettent au milieu,
et disent à Jésus :
« Maître, cette femme
a été surprise en flagrant délit d’adultère.
Or, dans la Loi, Moïse nous a ordonné
de lapider ces femmes-là.
Et toi, que dis-tu ? »
Ils parlaient ainsi pour le mettre à l’épreuve,
afin de pouvoir l’accuser.
Mais Jésus s’était baissé
et, du doigt, il écrivait sur la terre.
Comme on persistait à l’interroger,
il se redressa et leur dit :
« Celui d’entre vous qui est sans péché,
qu’il soit le premier à lui jeter une pierre. »
Il se baissa de nouveau
et il écrivait sur la terre.
Eux, après avoir entendu cela,
s’en allaient un par un,
en commençant par les plus âgés.
Jésus resta seul avec la femme toujours là au milieu.
Il se redressa et lui demanda :
« Femme, où sont-ils donc ?
Personne ne t’a condamnée ? »
Elle répondit :
« Personne, Seigneur. »
Et Jésus lui dit :
« Moi non plus, je ne te condamne pas.
Va, et désormais ne pèche plus. »