Reportage à l’occasion de la Fête des mères, le 9 avril 2024
Publication par Karin Padrutt
Amal sait ce dont les petits malades de Bethléem ont besoin
« Le Caritas Baby Hospital a changé ma vie du tout au tout », raconte Amal Hawash, chrétienne de Palestine. Dès qu’elle commence à travailler à l’hôpital en 1989 en tant que jardinière d’enfants, tout le monde reconnait ses atouts. A 62 ans, déjà grand-mère, elle prendra bientôt sa retraite et laissera un grand vide à l’hôpital.
Un portrait d’Andrea Krogmann depuis Bethléem.
Amal Hawash n’a pas de formation. Elle a quitté l’école après la dixième et s’est mariée tôt – un souci de moins pour sa mère qui devait élever seule ses enfants après le décès prématuré de leur père. Avec sa propre famille, cette femme de 62 ans n’a pas non plus eu des débuts faciles. « Une seule chambre. La cuisine et les toilettes dehors, dans la cour, et parfois pas assez d’argent pour acheter du pain », se souvient-elle. Mais tout change lorsqu’une amie, elle-même jardinière d’enfants à la crèche du Caritas Baby Hospital, la présente aux sœurs italiennes de l’ordre de Sainte Elisabeth qui travaillaient à l’hôpital pédiatrique jusqu’il y a quelques années encore.
Naturellement douée
Nous sommes en 1989. Amal est embauchée à la crèche de l’hôpital, bien qu’elle n’ait pas de formation. « Je crois que Dieu m’a donné un talent naturel. J’aime tous les enfants, je comprends les mères et je sais comment les soutenir », dit cette chrétienne originaire de Beit Sahour qui rayonne de joie de vivre. A l’époque, elle a déjà deux filles et un fils. Samah, sa troisième fille, vient au monde peu après – et trouve une place à la crèche de l’hôpital.
Même si les enfants d’Amal plaisantent aujourd’hui en disant qu’ils ne se souviennent pas de leur mère dans leur enfance, ils apprécient aussi beaucoup l’hôpital pédiatrique. Sa fille Ghadeer, décédée beaucoup trop jeune en 2017, a étudié à l’école de soins infirmiers de l’hôpital. Samah, la cadette, a suivi les traces de sa mère et donne un coup de main à la crèche en cas de besoin. « Concilier quatre enfants et le travail n’a pas été facile », raconte Amal, « mais mon travail à l’hôpital nous a sauvé la vie ». Grâce à son emploi de jardinière d’enfants dans cet établissement respecté, elle a pu financer une maison pour sa famille.
Indépendante et sûre d’elle
Amal pose un regard plein de reconnaissance sur ses 35 ans à l’Hôpital de l’Enfance Bethléem, mais pas seulement pour l’aspect financier. « Ce travail a renforcé ma confiance en moi. Il m’a débarrassée de ma timidité », dit-elle. Des formations continues organisées par l’hôpital l’incitent à se perfectionner en dehors de son travail. Aujourd’hui enseignante d’art, elle apprend à ses petits-enfants la peinture et le bricolage et souligne : « Que les femmes puissent travailler est essentiel, pas seulement pour leur indépendance financière, mais aussi leur confiance en elles. Je le dis par expérience. » Sa famille l’a toujours soutenue pour qu’elle puisse saisir ses chances à l’hôpital, y compris en 2013, lorsque la crèche devient une salle de jeux pour les enfants hospitalisés.
Après 25 ans auprès des enfants du personnel de l’hôpital, Amal se souvient à quel point la transition vers ce lieu d’accueil pour les patientes et patients de longue durée est pour elle un saut dans l’inconnu. Car en réalité cette salle de jeux a des objectifs thérapeutiques pour lesquels Amal n’a pas reçu de formation. « Les débuts étaient rudes, mais j’ai senti à quel point ce travail auprès des enfants malades était nécessaire. » A tel point qu’Amal ne limite pas son rayon d’action à la salle de jeux. Dès qu’elle le peut, elle se rend dans le service, lave les bébés, change les draps et a un sourire pour tout le monde. Confrontée à des maladies parfois très graves, elle raconte qu’elle prend tout particulièrement conscience du cadeau qu’est la santé. « Tout le monde devrait remercier chaque jour d’avoir des enfants en bonne santé. »