Le billet de Philippe Charmillot, LQJ 15.10.2024
Chaque minute, quarante-quatre femmes vivent une fausse couche dans le monde, d’après une revue médicale britannique. Au niveau suisse, les estimations avancent qu’une grossesse sur quatre serait concernée. Malgré cela, le silence autour de cet événement douloureux persiste car le sujet reste tabou. Il dérange et provoque des situations de malaise, bien au-delà de ce que nous imaginons. « Tu n’as plus de ventre : l’accouchement s’est bien passé ? ». Ou « C’est ton premier essai, tu auras d’autres bébés ».
Enfin cette collègue s’adressant à sa voisine de bureau revenue après quelques jours de maladie : « Ta grippe c’est fini ? », alors que celle-ci venait de vivre une interruption volontaire de grossesse. Alors peuvent se mettre en route des mécanismes de protection tel l’hyperactivité pour tenter d’oublier, l’isolement pour ne croiser personne ou la dépendance à un produit. Fuir la souffrance de la perte génère souvent un stress posttraumatique, de l’anxiété et de la dépression. Avec le risque de vivre la grossesse suivante « la peur au ventre ».
D’où la nécessité de sortir du silence, de trouver un accompagnement par un ou une professionnelle de la santé ou de l’Eglise formé à cet effet, de prendre le temps de l’adieu s’il n’y a pas de tombe. Depuis deux ans, la chapelle de Develier-Dessus accueille dans l’anonymat des personnes venues déposer un prénom, une phrase, une prière. Car Dieu ne nous envoie pas d’épreuves, mais quand elles surviennent, il les traverse avec nous, pour autant que nous lui ouvrions notre cœur.
L’objectif de ces différentes démarches est que l’avenir puisse s’envisager tout en sachant bien que la cicatrice demeurera et que la vie reprenne peu à peu ses droits.
Philippe Charmillot, Pastorale des familles, Delémont