Le billet de Didier Berret, LQJ 20.07.2024
Le vieux rabbin avait réuni ses plus fidèles disciples devant la place de la synagogue dans la vieille ville de Bratislava. Comme c'était l'hiver, il avait allumé un grand feu autour duquel il les accueillit et les salua l'un après l'autre au fur et à mesure de leur arrivée. Une fois tous présents, il laissa s'installer un temps de silence assez long, très solennel avant de prendre la parole, comme il en avait l'habitude.
Tous étaient pendus à ses lèvres tant sa sagesse était grande, son intelligence brillante et son verbe agréable. Il sortit de sa veste un grand cahier et leur dit: «Voici! À l'intérieur, j'ai consigné toutes mes pensées, toutes mes réflexions, ce que je vous ai enseigné de plus profond durant toutes ces années.»
À peine eut-il terminé sa phrase qu'à la stupeur générale, il jeta son livre au feu. Un homme eut le réflexe de se précipiter mais il le retint fermement et dit: «Laisse-le brûler! Vous n'avez pas à penser comme moi, chacun de vous doit faire son propre chemin avec l'aide des autres.» Puis il ajouta cette phrase devenue célèbre: «Ne demande jamais ton chemin à quelqu'un qui le connaît, tu n'aurais pas la chance de te perdre.» L'histoire est vraie. Le rabbin s'appelait Nahman, il n'a laissé aucun écrit mais il a peut-être inspiré Philippe Geluck qui a placé dans une bulle du Chat cette réplique savoureuse digne du rabbin de Bratislava et que ni Socrate ni Jésus n'auraient reniée: «C'est en errant ensemble qu'on devient co-errant.»
En vous souhaitant un bel été avec des lieux de paroles constructifs.
Didier Berret, diacre