Le billet de Philippe Charmillot, JDJ 5 août 2023
- On peut tuer avec un stylo. Souvent plus efficace qu’un flingue. Et plus discret qu’un pistolet. Ces stylos tueurs salissent le papier des lettres anonymes, par des injures et des obscénités.
- On peut tuer l’enfant dont la mère, à bout nerveusement, ne veut plus. Tout en étant contre l’avortement. Comment ? En la laissant seule, sans lui donner une présence, du travail, un endroit où elle se sentira à l’abri et entourée.
- On peut tuer un être cher à qui l’on a dit un jour « je t’aime » en lui retirant son amour. Les enfants issus de cet amour peuvent aussi être tués lentement par le marchandage affectif et les tiraillements entre les parents.
- On peut tuer l’autre en se servant de Dieu pour définir qui a le droit à l’existence, et supprimer les autres au nom d’un Dieu dont on prend la place.
- On peut tuer quand on assène régulièrement à sa femme, à son mari ou à son enfant : « Tu ne changeras jamais ». L’espérance massacrée dans un être, conduit souvent à toutes les dérives et au naufrage de la vie.
- On peut tuer plus lentement quand on refuse de donner des règles ou des barrières à ses gamins en bas âge. Et plus tard quand on accepte ou entretient leur désir de posséder ou de paraître quoi qu’il en coûte, par n’importe quel moyen.
- On peut tuer par la langue. La médisance fait un mal fou. Mais lancer des rumeurs est encore pire.
- On peut tuer une personne en ne lui donnant plus de nouvelle, toute engluée qu’elle est dans son problème, sa maladie, sa solitude, son infirmité ou sa vieillesse.
- On peut tuer l’avenir de nos descendants par la pollution. Quand elle est considérée comme l’affaire des autres. Elle provoque des milliards de gestes qui peuvent rendre un jour la terre irrespirable.
- On peut tuer les habitants des pays pauvres par le simple gaspillage quotidien des pays riches comme le nôtre. Rien de plus dangereux pour une politique mondiale d’hésiter, de tâtonner et de stagner dans un système pétri d’injustices, de profits et d’inégalités.
La peine de mort n’est jamais demandée pour la plupart de tous ces tueurs. Et tant mieux. Parce qu’à tout moment la vie peut être plus forte que les germes de mort qui habitent une personne.
Philippe Charmillot, Pastorale des familles pour le Jura bernois et le Jura