Diaconat : entretien avec Patrick Godat
« Ce qui m’importe, c’est la proximité avec les gens »
Patrick Godat, animateur pastoral dans l’Unité Saint Gilles - Clos du Doubs, marié et père de trois enfants, sera ordonné diacre permanent le 17 novembre, à 14h30, en la collégiale de Saint-Ursanne. La célébration sera présidée par Mgr Felix Gmür, évêque du diocèse de Bâle. A l’aube de son 46e anniversaire, rencontre avec cet enfant de la cité médiévale pour évoquer son parcours de vie et son engagement diaconal.
Patrick Godat a toujours été fasciné par les torii, ces portails traditionnels érigés à l’entrée des sanctuaires shintoïstes, en particulier celui de Miyajima, dressé dans l’eau, qui marque symboliquement la séparation entre le monde physique et le monde spirituel.
Lecture du film = 3'40''
Le 12 mai dernier, à Courgenay, Patrick Godat a été institué lecteur et acolyte par Mgr Denis Theurillat. Puis, le 8 juin, au terme de sa formation complémentaire à l’Université de Fribourg, il a été officiellement admis candidat au diaconat… l’admissio, l’ultime étape avant l’ordination diaconale. Engagé depuis trois ans dans l’Equipe pastorale de l’Unité Saint Gilles – Clos du Doubs qui rassemble les paroisses de Cornol, Courgenay-Courtemautruy, Epauvillers-Epiquerez, Saint-Ursanne et environs, Patrick Godat se réjouit de pouvoir exercer un ministère de proximité. Ce d’autant que, pour l’année pastorale 2019-2020, il n’y a aucun prêtre dans l’Equipe pastorale conduite par le diacre Philippe Charmillot.
Un diacre responsable de communauté, ce n’est pas banal. C’est même une première dans le Jura pastoral, non ?
- Non, il y a deux autres situations similaires aux Franches-Montagnes et à Courtételle, dans l’UP Sainte-Marie. Ce qui est particulier à dans notre Unité pastorale pour cette année, c’est justement qu’aucun prêtre ne fait partie de notre équipe. La charge curiale est donc assurée « à distance » par le vicaire épiscopal et ce sont trois prêtres retraités qui se partagent les messes dominicales. Cette situation inédite démontre qu’un agent pastoral marié peut très bien gérer une paroisse. En l’occurrence, Philippe Charmillot le fait avec brio !
Quel est le rôle d’un diacre permanent ?
- S’il ne célèbre pas l’eucharistie, le diacre peut prêcher, baptiser, marier ou célébrer des funérailles. Mais le « faire » ou le « pas faire » n’est pas ce qui m’importe. Ce qui compte, c’est la proximité avec les gens… et cette notion de service aux plus pauvres qui est constitutive de l’Eglise.
Il y a plusieurs parcours de formation pour cheminer jusqu’à l’ordination diaconale. Il n’est donc pas indispensable d’être théologien détenteur d’une maîtrise universitaire ?
- Non, pas dans notre diocèse. Personnellement, je suis le « fruit » d’une ouverture au diaconat proposée au début des années 2000 par Mgr Kurt Koch, alors qu’il était notre évêque diocésain. Outre mon diplôme de l’Institut romand de formation aux ministères (IFM) à Fribourg et mes années en pastorale, j’ai complété ma formation avec l’équivalent d’un bachelor en théologie. Voyez-vous, la formation est une chose, mais répondre du mieux que l’on peut à notre vocation personnelle est, pour moi, primordial. Le moyen d’y répondre est propre à chaque histoire et ne devrait pas être source d’orgueil.
Vous êtes marié et père de trois enfants. Quelle place occupe votre famille dans cet engagement au service de l’Eglise ?
- Bien que nous vivions une situation particulière, mon épouse Laurence et mes enfants - Charlie, 16 ans ; Justine, 13 ans et Isaac, 11 ans - m’accompagnent dans ma mission ecclésiale depuis le début. Ainsi, mes enfants sont servants de messe, animent musicalement des célébrations et m’aident à bien d’autres occasions, notamment dans leurs réflexions et leurs questionnements. J’avoue avoir beaucoup de chance !
En quelques mots, quel a été votre parcours depuis votre enfance à Saint-Ursanne ?
- Après une formation à l’école de commerce à Porrentruy, j’ai bourlingué durant une année en Australie. Puis, après l’armée, attiré par la culture japonaise, j’ai suivi des cours de langue et je suis allé plusieurs mois au Japon. Sans quitter ma relation avec Jésus-Christ, je me suis imprégné de leur spiritualité. J’ai été fasciné par les torii, ces portails traditionnels érigés à l’entrée des sanctuaires shintoïstes, en particulier celui de Miyajima, dressé dans l’eau, qui marque symboliquement la séparation entre le monde physique et le monde spirituel. Chaque torii traversé pour accéder à un sanctuaire doit être retraversé dans l’autre sens pour revenir dans le monde matériel. On retrouve un peu cette symbolique chez nous, en franchissant le porte d’une église, symbole de la « Jérusalem céleste ». Bref, faute d’argent, je suis revenu en Suisse, engagé au service expédition d’une manufacture horlogère des Franches-Montagnes. Deux ans plus tard, histoire d’apprendre l’allemand, j’ai bossé pour une société bâloise de chiffons de nettoyage. D’abord à l’exportation, puis au marketing. Une belle expérience de vie avec un chef qui priait les laudes, tous les matins dans son bureau. Ce n’est pas banal !
Et l’Eglise dans tout ça ?
- D’une manière ou d’une autre, j’ai toujours été impliqué en Eglise. Gamin, j’étais servant de messe et dans des groupes d’enfants. Animateur jeunesse bénévole à la fin des années 90, c’est sur les conseils de Jean-Claude Boillat, agent pastoral, que j’ai entamé – après une année de discernement – une formation d’animateur pastoral à l’IFM à Fribourg. La suite c’est, de 2002 à 2009, sept années à Bassecourt dans l’Unité Sainte-Colombe ; puis de 2009 à 2016, sept ans à Boncourt, dans l’Unité pastorale de l’Eau Vive. En 2016, j’ai été nommé dans l’UP Saint Gilles - Clos du Doubs. Je n’ai eu que des belles années en pastorale. Vraiment. A ce stade, j’aimerais remercier tous les collègues et les communautés avec qui j’ai eu la chance de travailler jusqu’ici.
Pour vous guider dans cette démarche diaconale, aviez-vous un conseiller spirituel ?
- Au début de mon questionnement, j’ai pu compter sur l’abbé Philippe Rebetez, alors curé à Saint-Ursanne. Puis, après plusieurs années durant lesquelles « mes » équipes pastorales successives ont joué ce rôle en quelque sorte, j’ai pris contact avec l’abbé Bernard Miserez. Un enfant du Clos du Doubs lui aussi… et pour moi ça compte !
Le 17 novembre, lors de l’ordination diaconale de son mari à la collégiale de Saint-Ursanne, Laurence Godat sera invitée, par Mgr Felix Gmür, à donner son accord en répondant à la question : « Acceptez-vous tout ce que le diaconat apportera de nouveauté dans votre vie conjugale et familiale ? » A suivre…
Pascal Tissier