La musique à Taizé, source de réconciliation.
La réconciliation entre les chrétiens – et entre les hommes du monde entier – est au cœur de l’intuition de Frère Roger lorsqu’il fonde, en 1949, sa communauté avec quelques frères. Devenir ferment d’unité entre tous est le socle sur lequel se fonde toute la spiritualité de la communauté des frères de Taizé, à la suite du Christ mort et ressuscité. Ainsi, dès 1957, et grâce au frère Jacques Berthier notamment, les chants de Taizé deviennent hymnes rassembleurs pour des millions de jeunes. Pour que ceux-ci deviennent, là où ils vivent, des ferments d’unité entre les peuples.
Comment unifier les langues ? Comment appeler les jeunes du monde entier à se parler, se rencontrer, s’engager dans le monde et, dès 1970, être ensemble pour le « pèlerinage de confiance sur la terre » ? Ainsi, les premiers chants « Ubi caritas », « Laudate omnes gentes » ou encore « Bonum est confidere » seront les chants de ralliement qu’utiliseront les chrétiens de l’Est pour, pas après pas, anéantir les frontières.
« Dans une prière commune, les chants méditatifs permettent à tous de participer et de tenir ensemble dans l’attente de Dieu »1. Avec des mots simples, répétés inlassablement, les chants de Taizé invitent à une méditation et, peu à peu, pénètrent l’esprit de ceux qui les entonnent. La mélodie est souvent basique, même si celle-ci peut se décliner ensuite en partitions à 4 voix ou en partitions d’orchestre ; mais elle est essentiellement au service de l’unité. Sentir – ressentir – l’assemblée constituée de milliers de jeunes (et de moins jeunes !) est une expérience unique dans l’église de la réconciliation (nom donné à l’église, centre du site, par frère Roger) : quel que soit son origine, sa langue, même sa religion, chacun se sent concerné et interpellé par la beauté et la simplicité du chant. Chaque fin d’année depuis 1970 – année du premier concile des jeunes, à la suite du concile Vatican II -, les frères se déplacent aux 4 coins du monde durant 4 jours afin de créer une communauté éphémère constituée de millions de jeunes. Ce sont ces rencontres internationales qui permettent également aux personnes n’ayant pas la possibilité de venir en Bourgogne de bénéficier de cette spiritualité.
Trois fois par jour lors de la prière commune, les chants rassemblent toutes les langues du monde en communion. Si le latin a été beaucoup utilisé par le passé, actuellement les chants sont adaptés et déclinés en de multiples langues : de la petite communauté africaine, en passant par les balkans ou encore un dialecte indi, chaque nouvelle contrée présente à Taizé se voit figurer dans un chant. Et, si la contrée en question vit un temps de guerre et d’oppression, les frères hâtent de transcrire un des chants connus dans sa langue afin de s’unir à leurs souffrances par la prière et le chant.
Taizé, grâce à des mélodies accessibles à tous et aux paroles d’Evangiles ainsi semées, est le symbole même de ce que la musique peut apporter au monde et, plus spécifiquement, à l’exercice de la spiritualité pour chacun. « Si tu perdais la miséricorde, cette compassion du cœur, tu aurais tout perdu »2 . Cette parole de Frère Roger invite bien à dépasser le simple fait d’entonner un chant connu ensemble. En effet, ce chant invite à se définir, à s’engager concrètement dans le monde pour que cette miséricorde s’incarne. Pas seulement lorsque la fête de la résurrection résonne, (chaque samedi soir, avec illumination de l’église comme on en connaît le samedi Saint) mais quand le quotidien reprend ses droits.
Chaque année depuis des décennies, les différents animateurs de la jeunesse du Jura emmènent les jeunes à Taizé. Des milliers de jurassiens ont non seulement appris les chants, mais ont surtout goûté une fois au moins à une vie simple et possible ensemble, au-delà des différences. Ce ferment ou ce désir d’unité né dans un chant commun, soutenu par une musique simple, peut devenir le moteur de toute une vie d’engagements ou de toute une vie à la suite du Christ. Ainsi, la communauté des frères de Taizé (avec leur nouveau prieur Frère Matthew, après frère Aloïs et le fondateur frère Roger) et leurs chants caractéristiques sont intrinsèquement liés à l’épanouissement de l’humain et par extension de toute la création. Alléluia, Laudato si !
Pour en savoir plus : www.taize.fr