Jura Pastoral

La RTS supprime ses magazines religieux

Mesures d'économie à la SSR • A l’horizon 2017, «Faut pas croire» sur RTSun, «Hautes fréquences» sur La Première et «A vue d’esprit» sur Espace 2 devraient disparaitre. Seuls les cultes, messes, l’émission de documentaire «Dieu sait quoi» et la chronique quotidienne diffusée peu avant 6h30 sur La Première perdureront, à moins d’un accord trouvé durant les négociations menées en 2016.

«Cette décision unilatérale de la Radio télévision suisse (RTS) participe d’un anticléricalisme primaire qui considère que les religions sont à l’origine de violence et qu’il faut donc les bannir de l’espace public. Or c’est tout le contraire qu’il faut faire! Les religions quand elles sont intégrées et reconnues, contribuent à lutter contre les dérives sectaires», réagit Xavier Paillard, président du Conseil exécutif de la Conférence des Eglises réformées de Suisse romande (CER). Par le biais de son office des médias Médias-pro, la CER est le partenaire protestant de la RTS pour la production des émissions de RTSreligion. Médias-pro est également éditeur de Protestinfo.

«Pourquoi RTS religion devrait y laisser 50% de ses forces?»

Dans un communiqué commun avec Cath-info, le partenaire catholique, Médias-pro annonce que la direction de la RTS a décidé de supprimer «Faut pas croire» sur RTS un, «Hautes fréquences» sur La Première et «A vue d’esprit» sur Espace 2, mettant ainsi à mal une collaboration entre RTS et Eglises remontant à 1964. La disparition de ces émissions interviendrait en 2017, puisque c’est à cette date que prendra fin l’actuelle convention qui lie RTS, Cath-info et Médias-pro. «D’ici là, nous mènerons des négociations», rassure Xavier Paillard.

Si «la RTS finance l’entier des frais de production et de diffusion de ces émissions, les Eglises participent au financement du personnel rédactionnel. Ainsi sur les 12 équivalents plein-temps de journalistes, le service public en finance 4,5», estime Michel Kocher, directeur de Médias-pro. Selon le communiqué, la moitié de ces effectifs sont concernés par une disparition de ces trois émissions. Disproportionné: «Les économies que la RTS doit mettre en œuvre correspondent à 3% de son budget. Pourquoi RTSreligion devrait y laisser 50% de ses forces? Ce d’autant plus que Cath-Info et Médias-pro produisent les émissions parmi les moins chères de tous les programmes.»

Des licenciements sont à craindre parmi les journalistes

Le personnel technique, qui n’est pas dédié à une émission spécifique, pourrait collaborer à d’autres émissions. En revanche, des licenciements sont à craindre parmi les journalistes. Les employés des Eglises bénéficieront-ils des mêmes conditions de fin de contrat que leurs collègues de la RTS? «Les collaborateurs concernés n’ont pas de contrat RTS. Ils ne peuvent dès lors pas bénéficier automatiquement du plan social négocié entre la SSR et le SSM (syndicat suisse des mass medias). Néanmoins, la RTS veillera à ce que des mesures d’accompagnement adéquates soient possibles pour des collaborateurs collaborant de longue date avec elle», promet Barbara Stutz, cheffe de presse de la RTS. Pour la RTS, par contre, il n’est pas encore possible de chiffrer précisément le nombre de postes touchés.

«Aujourd’hui, les magazines religieux couvrent l’entier des confessions et religions à la satisfaction de tous. Une récente analyse externe concernant la couverture du judaïsme a souligné l’équité et l’équilibre du traitement», rappelle le communiqué qui souligne: «A l’heure où la radicalisation religieuse est à l’œuvre, où les replis identitaires sont une forme de penchant naturel, ce choix éditorial de la direction des programmes de la RTS est incompréhensible.»

La RTS rassure

«L’ensemble de l’offre de la RTS est utile et nécessaire, et dès lors toutes les coupes sont difficiles. Nous ne remettons pas en question la qualité des émissions que nous devons interrompre. Et nous continuerons à traiter des questions religieuses et de leur dimension géopolitique, culturelle et sociologique dans différentes émissions», réagit Barbara Stutz. «Par ailleurs les émissions religieuses ne sont pas le seul domaine touché par ces économies.»

Elle rassure: «les thèmes traités dans les émissions supprimées (éthique, philosophie) seront abordés dans d’autres émissions de la RTS. Ce qui permettra également de les rendre accessibles à un plus large public. Par ailleurs, ce domaine éditorial restera présent sur les grilles d’Espace 2.»

Lors de la précédente négociation de la convention la direction de la chaîne se réjouissait de l’engagement des Eglises qui participaient à la «générosité de l’offre», selon le directeur des programmes, Gilles Pache, interrogé par «Le Courrier» en 2013. Il déclarait alors que les émissions religieuses «assument un rôle pédagogique indispensable». Et il ajoutait: «dans notre société en évolution elles peuvent contribuer à éviter des dérives islamophobes, par exemple.»

Joël Burri, Protestinfo

 

 

La réaction de Mgr Alain de Raemy

L'évêque aux médias inquiet face à l'annonce de la RTS

Mgr Alain de Raemy, évêque chargé des médias au sein de la Conférence des évêques suisses (CES), a exprimé son inquiétude après l’annonce de la suppression des magazines religieux sur la radio et la télévision suisses romandes. “Il en va de la place que l’on donne à la dimension religieuse de l’homme en ces temps où la religion est si souvent et de si diverses manières d’actualité”, souligne-t-il dans un communiqué du 18 novembre 2015.

mgr de raemy Mgr Alain de Raemy, évêque des médias au sein de la Conférence des évêques suisses lors de l'assemblée générale de Kipa-Apic à Olten (Photo Apic)

La suppression de trois magazines religieux, «Faut pas croire» sur RTS un, «Hautes fréquences» sur La 1ère et «A vue d’esprit» sur Espace 2, aura des conséquences sur le traitement des sujets religieux par les médias du service public francophone en Suisse, déplore l’évêque auxiliaire de Lausanne, Genève et Fribourg.

L’évêque des médias tient aussi à exprimer sa plus profonde solidarité avec les journalistes engagés dans le service œcuménique assuré par Cath-Info, du côté catholique, et Médias-pro, du côté protestant et qui risquent de perdre leur emploi.
Pour une présence œcuménique dans tous les médias

“En tant qu’évêque chargé d’encourager une présence catholique, ouverte et œcuménique, dans tous les médias, j’exprime mon inquiétude. Il en va de la place que l’on donne à la dimension religieuse de l’homme en ces temps où la religion est si souvent et de si diverses manières d’actualité, rélève Mgr de Raemy. Il me semble important de souligner l’importance du service public aussi pour tout ce qui concerne la dimension spirituelle et œcuménique de notre culture et de notre avenir.”

“Nous avons peut-être aussi à trouver de nouvelles voies pour une collaboration fructueuse entre le service public et les Eglises dans l’intérêt des débats de société”, conclut l’évêque des médias. (apic/com/mp)

 

 

RTSreligion décapité

Le communiqué de presse de Cath-Info et Médias-Pro

Cath Info Bernard Litzler Bernard Litzler, directeur de Cath-Info

Au moment où la nécessité d’un traitement religieux de l’information se manifeste à travers les tragiques événements de Paris, la direction de la RTS annonce, le 17 novembre, la suppression pour 2017 de tous ses magazines religieux radio et télé. Cette mesure est inopportune et disproportionnée. Médias-pro et Cath-Info, qui portent avec la RTS la responsabilité de ces magazines, espèrent que ce partenariat ancien et fructueux pourra perdurer de façon crédible.

Paris est confronté au terrorisme djihadiste. De son côté, l’équipe de RTSreligion va lancer dans les prochains jours Orient-Occident, regards croisés, un coffret de 3 CD autour de la mémoire complexe des croisades. Or la direction de la RTS a fait savoir que les magazines religieux radio-tv seront supprimés en 2017. Cela revient à amputer RTSreligion de 50% de son potentiel d’environ 12 EPT. Nos journalistes, et leurs employeurs que nous représentons, Cath-Info (catholique) et Médias-pro (protestants-CER), sont sous le choc. Ils ne comprennent pas pourquoi un travail et une collaboration éditoriale, uniques en Suisse, sont ainsi massivement et unilatéralement déconstruits, avec à la clef de probables suppressions d’emplois.

Supprimer les deux magazines radio (A vue d’Esprit et Hautes Fréquences) et le magazine TV (Faut pas croire) revient à ne plus offrir aux auditeurs et spectateurs romands, des rendez-vous réguliers d’analyse de la dimension religieuse de la société. Nos journalistes n’auront plus la possibilité de proposer des magazines d’approfondissement, de reportage et de débat interreligieux. A l’heure où la radicalisation religieuse est à l’œuvre, où les replis identitaires sont une forme de penchant naturel, ce choix éditorial de la direction des programmes de la RTS est incompréhensible.

Le partenariat éditorial entre la RTS, Cath-Info et Médias-pro est ancien. Les premiers magazines religieux datent de 1964. Dans les années 2000, les journalistes protestants et catholiques ont élargi leur contenu au domaine interreligieux. Aujourd’hui ils couvrent l’entier des confessions et religions, à la satisfaction de tous. Une récente analyse externe concernant la couverture du judaïsme a souligné l’équité et l’équilibre du traitement. D’innombrables débats, dossiers et reportages ont fait connaître au grand public des voix et acteurs essentiels. La suppression des magazines rendra très difficile, sans doute impossible, le maintien d’une rédaction religieuse au sein de la RTS.

Les raisons financières invoquées par la direction de la RTS doivent être mises en perspective. Les économies que la RTS doit mettre en œuvre correspondent à 3% de son budget. Pourquoi RTSreligion devait y laisser 50% de ses forces? L’effort est disproportionné. Ce d’autant que Cath-Info et Médias-pro produisent les émissions parmi les moins chères de tous les programmes. De plus, ils assument une part non négligeable des coûts, notamment les salaires de producteurs. Dans ces circonstances, difficile de ne pas voir une décision qui répond à d’autres objectifs qu’économiques.

Les soussignés espèrent que les négociations avec la direction de la RTS, au cours de l’année 2016, pour la reconduction de la convention entre le service public et les organes ecclésiaux, conduiront à une meilleure prise en compte de la dimension religieuse au sein des programmes de la RTS.

Michel Kocher, directeur de Médias-pro

Bernard Litzler, directeur de Cath-Info

Agenda et messes

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